APE : la société civile ouest africaine appelle à sauver l’agriculture de la région

4 novembre 2013

APE : la société civile ouest africaine appelle à sauver l’agriculture de la région

La société civile a souhaité que la Commission de la CEDEAO organise sans tarder, une large concertation, ouverte et inclusive, pour informer tous les acteurs de l’Afrique de l’Ouest des enjeux et défis du TEC, et créer ainsi les conditions permettant de corriger les imperfections et rendre possibles, son appropriation et son application.
La société civile a souhaité que la Commission de la CEDEAO organise sans tarder, une large concertation, ouverte et inclusive, pour informer tous les acteurs de l’Afrique de l’Ouest des enjeux et défis du TEC, et créer ainsi les conditions permettant de corriger les imperfections et rendre possibles, son appropriation et son application.

Dans l’optique du renforcement du processus d’intégration économique en Afrique de l’Ouest, la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) s’est réunie en session extraordinaire à Dakar au Sénégal, le 25 octobre 2013. Aussi, deux importantes décisions ont été prises. Il s’agit de l’adoption du Tarif extérieur commun (TEC) pour l’ensemble des quinze Etats membres de la communauté. Concrètement, cela signifie que dès l’application de ce nouveau dispositif, prévue janvier 2015, lorsque des taxes douanières sont prélevées sur une marchandise à l’entrée d’un des Etats de la sous-région, celle-ci devra pouvoir circuler librement dans tous les autres pays de la zone. Ce qui permet aux partenaires commerciaux étrangers d’avoir accès à un marché de plus 300 millions d’habitants que représente cette communauté. Deuxièmement, les dirigeants des pays membres de la CEDEAO ont réitéré leur attachement à la conclusion d’un APE régional, équitable et axé sur le développement. Le sommet a demandé aux négociateurs en chef de l’Afrique de l’Ouest de reprendre diligemment, les discussions avec la partie européenne dans l’optique de conclure, dans les meilleurs délais, l’accord régional. Le sommet leur demande également de veiller au financement approprié du programme de l’APE pour le développement (PAPED) et des coûts d’ajustement fiscaux, afin d’assurer un équilibre avec l’offre d’accès au marché. Ces décisions jugées positives par certains observateurs ne rassurent pourtant pas la société civile de l’Afrique de l’Ouest qui l’a fait savoir, à travers un mémorandum. Ses inquiétudes concernent surtout le secteur agricole de l’Afrique de l’Ouest.

« Nous sommes conscients que quelles que soient la nature du TEC et la qualité de la politique commerciale régionale sur le papier, elles ne pourront atteindre leur objectif de renforcement des secteurs de production, de la compétitivité de l’économie et du commerce intra-régional que si les Etats de l’Afrique de l’Ouest respectent leurs engagements relatifs à la mise en œuvre des protocoles et décisions sur la libre circulation des biens et des personnes auxquels ils ont librement souscrits », a-t-elle déclaré. La société civile se dit préoccupée par la négociation de l’Accord de partenariat économique (APE) et les défis qu’elle pose à l’Afrique de l’Ouest. Contrairement aux promesses initiales de l’Union européenne faisant de l’APE un instrument pour renforcer l’intégration régionale, c’est bien le contraire qui s’est produit car, l’Afrique de l’Ouest a été fragmentée, balkanisée en cinq régimes commerciaux différents, suite à la signature des APE intérimaires. Pour elle, l’adoption récente par l’UE d’une décision menaçant de retirer les préférences à la Côte d’Ivoire et au Ghana, entre autres pays ACP, à l’horizon du 1er octobre 2014, apparaît comme une pression qui risque d’affaiblir les lignes de résistance de l’Afrique de l’Ouest et la pousser vers un APE « à tout prix ». La société civile ouest-africaine a rappelé que l’APE n’est qu’un accord commercial, de surcroît avec un partenaire dont les parts dans notre commerce, ont chuté de 75% en 1975 à 28% actuellement. « Il ne peut en aucun cas remplacer notre politique commerciale, ni déterminer celle-ci. Sa conclusion ne se justifie que s’il est porteur de progrès et s’il peut contribuer concrètement, à réaliser des objectifs de développement économique et social des pays et de leurs peuples », a-t-elle ajouté. Sur l’offre d’accès au marché, l’Afrique de l’Ouest a consenti les plus importants efforts pour se rapprocher de la position de l’Union européenne. Mais en dépit de ces efforts, l’Union européenne est restée campée sur ses positions, exigeant 80% d’ouverture du marché régional. Par ailleurs, les organisations de la société civile rejettent d’avance la nouvelle offre d’ouverture de 75%, car elle est économiquement insoutenable et socialement, catastrophique pour l’Afrique de l’Ouest. « Des études rigoureuses, jusqu’ici non démenties, ont prouvé son impact négatif, en termes de détournement de commerce, pertes de recettes fiscales, perte de revenus pour les ménages, précarité et menace sur l’emploi et de l’investissement, entre autres », précise le mémorandum. Elles préconisent dans le secteur agricole de prendre des mesures de défense commerciale appropriées et adaptées à la nature particulière de l’Afrique de l’Ouest. Ces mesures de sauvegarde doivent être faciles à mettre en œuvre et strictement, orientées vers les besoins de développement de l’Afrique de l’Ouest et non pas déterminées par des accords internationaux souvent mal négociés que seuls nos pays sont parfois les seuls à appliquer à la lettre. Les organisations signataires de ce mémorandum ont lancé un appel à la CEDEAO pour la mise sur pied d’un Fonds de soutien à l’intégration régionale (FSIR).

Ce fonds qui pourrait être alimenté, entre autres, par le prélèvement communautaire unique de 1.5%, servirait à compenser dégressivement, les pertes que pourraient subir les pays signataires d’APE intérimaires. Pendant ce temps, ces pays, comme l’ensemble de la région, travailleraient à finaliser les politiques sectorielles communes régionales, accroître la compétitivité et approfondir l’intégration économique, en opérationnalisant les mesures sur la libre circulation des biens et des personnes.

La société civile a souhaité que la Commission de la CEDEAO organise sans tarder, une large concertation, ouverte et inclusive, pour informer tous les acteurs de l’Afrique de l’Ouest des enjeux et défis du TEC, et créer ainsi les conditions permettant de corriger les imperfections et rendre possibles, son appropriation et son application.

Les organisations qui ont signé ce mémorandum viennent du Bénin, du Burkina, de la Côte d’Ivoire, de la Gambie, du Ghana, de la Guinée, de la Guinée-Bissau, du Mali, au Niger, du Nigeria, du Sénégal et du Togo. Elles ont tenu, les 23 et 24 octobre 2013, des assises à Dakar qu’ils ont appelé « le sommet des peuples de la CEDEAO ». Le mémorandum a été signé par des organisations comme la Coalition malienne des acteurs non étatiques pour l’Accord de Cotonou (CMANE-AC), le Réseau des organisations paysannes et des producteurs de l’Afrique de l’Ouest (ROPPA), le Secrétariat permanent des ONG du Burkina(SPONG) etc.

Raphaël KAFANDO

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